Les fleurs bleues, tout le monde s'accorde à le dire, c'est joli. Très joli.
Ça pousse dans les champs, dans les sous-bois, sur les grèves, dans les jardins ; Y'en a des ptites, des grosses, des moyennes, des rikiki et des énauRmes .
Ubiquistes et multiformes elles sont, les belles !
Celles que je préfère, moi, sont les sauvages, celles qui ont décidé de germer, là, à cet endroit, poussées par la bise ou amenées par le pollen, le nez au vent ou au soleil, selon...
Elles ont choisi ?...ou pas !
Mais maintenant qu'elles ont trouvé leur berceau, elles prennent leur parti à pousser, à embellir et... à bleuir.
Et elles vivent dans l'air du vent ces graciles demoiselles !!!
N'allez pas croire pourtant que ce soit une idylle ! Oh que non !!!
Imaginez plutôt ce que sont pour elles tempêtes et ouragans, averse et grèle ! Rien de comparable avec avec la caresse frissonnante du vent et la rosée fraiche du matin !
Et les pieds cornus des ongulés, les semelles crantées des randonneurs ? Les langues animales qui les arrachent pour les engloutir, les incisives des fillettes qui les écrasent pour en téter le suc ?
Voilà les petites, les pauvres petites ce qu'elles subissent.
Et à elles, pas une épine de rose pour les défendre !...
Ne rencontre pas Le Petit Prince qui veut!!! ... Pas même une fleur bleue...
Mais écoutez encore, il y a pire, bien pire !
... Il y a le ton amusé, dédaigneux ou condescendant, rarement très tendre, qu'on utilise, nous autres, en parlant d'une fleur bleue, vous savez, la nana sentimentale , un brin rêveuse.
Celle là dont on rigole quand, embarquée dans les flots du désir, elle saute et tressaute, caracole et cabriole, imagine et improvise.
- Ben, pour une fleur bleue!!!... dit-on, haut ou bas...
Parce que, à celle-là, point le droit de lâcher son expression discrète et naïve, point le droit de vivre son désir et d'aller chercher son plaisir...
Ben, vous m'répondez pas !!! Pourquoi les fleurs bleues n'auraient-elles pas droit au désir ???
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