Quavait-il encore à leur offrir ?
Parfois il se le demandait. Bien sûr, il pouvait encore leur donner du plaisir même si lui-même commençait à se lasser après leurs premiers émois, quand il avait compris comment elles fonctionnaient.
Mais il y avait la magie des mots. Certaines savaient faire naître des univers nouveaux.
Cétait comme si elles agrandissaient lespace, construisant pour lui des mondes peuplés dhistoires, de personnages et de couleurs, mélange parfois de fiction et de réalité qui le charmait.
Il y avait aussi leurs visages, celles qui lattendrissaient avaient su garder une expression denfance, un trésor secret démotions qui habillaient leurs mots.
Elles passaient, se reposaient auprès de lui, réparaient parfois quelques blessures puis sen allaient en sexcusant mais il ne les retenait jamais.
Le lien se distendait progressivement. Il les voyait reprendre des couleurs, des forces et puis un jour, elles senvolaient comme les oiseaux blessés quil recueillait enfant et quil relâchait quand ils étaient guéris.
Et, il avait autant de plaisir à les recueillir quà les voir reprendre leur liberté.
Une fois seulement, il en avait vraiment été affecté, la première.
Elle était entrée dans sa vie comme un coup de vent frais, une brise légère qui était venu aérer la vie studieuse et austère quil avait alors, quand il était tellement sérieux et quil croyait encore à ses idées.
Elle était là assise face à lui. Cest son béret rouge vissé sur la tête dont quelques mèches châtaines séchappaient qui avait attiré son attention. La plupart du temps, ses yeux semblaient perdus dans le lointain sauf quand elle se mettait à prendre des notes.
Un jour, elle était venue lui poser des questions à la fin du cours et il avait été sous le charme.
A cette époque, il était encore jeune et plus entreprenant quaujourdhui où la plupart du temps cétait les femmes qui prenaient linitiative dun rendez-vous avec lui.
Il lavait invitée à prolonger la conversation dans le café où il se rendait habituellement et ils ne sétaient quasiment plus quittés.
Il adorait sa spontanéité, sa fraîcheur et sa curiosité. Elle voulait écrire un roman mais elle remettait toujours le passage à lacte. Cependant, elle lui en racontait la trame, les personnages quelle envisageait de créer et dans ces moments là il la regardait avec ravissement tellement elle semblait vivre ses récits.
Un jour, un matin plutôt, elle avait disparu. Quand il sétait réveillé, elle nétait plus à côté de lui, elle avait emporté sa valise et les quelques objets ou livres quelle avait amenés avec elle.
Il avait été perdu pendant quelques jours, ne sachant quelle action entreprendre, réalisant quil ne connaissait pas son passé, ne sachant qui contacter ni à qui sadresser.
Puis un jour dans lamphi, il avait aperçu son béret rouge, son cur sétait mis à battre plus vite mais il navait pas interrompu son cours. A la pause, il sétait précipité mais elle était déjà partie. Quelques jours après, il avait reçu une lettre dans laquelle elle lui expliquait quelle avait besoin de vivre pour pouvoir écrire son roman qui comptait plus que leur amour et quelle lui demandait de ne pas lui en vouloir.
Pendant quelques années, il en avait été profondément affecté, avait espéré son retour, guetté même la devanture des librairies dans lattente de ce fameux roman mais rien de tel ne sétait jamais produit.
↧