"Les talons hauts vous mettent le cul sur un piédestal, là où il doit être"
Si je tenais l'imbécile qui a eu la bonne idée d'inventer les talons hauts (il paraîtrait que c'est Léonard de Vinci, mais on lui a tout fait inventer !), je lui dirais que oui il a raison, c'est terriblement sexy, que la petite robe noire banale devient d'une sensualité troublante dès lors qu'elle se retrouve 10 cm plus haut que d'habitude.
Il n'empêche que je voudrais lui rappeler qu'il a juste oublié de fournir le mode d'emploi pour pouvoir -aussi- se déplacer perchée sur ces sublimes certes, mais terribles instruments de torture.
Parce qu'il y a deux problèmes : le premier est de pouvoir simplement arriver à les enfiler, et le second, d'arriver à marcher.
Donc, s'asseoir sur le rebord d'une chaise (pas le lit : c'est trop bas). Se tenir droite, les épaules en arrière, la tête haute (ça va pas durer longtemps, la tête haute). Commencer par le pied droit, arquer le cou-de-pied et glisser le dans la chaussure. Les orteils doivent être poussés en avant, légèrement serrés (ah bon ?). Votre poids se déplace le long de votre jambe, de votre pied à votre hanche. Vos mollets sont tendus, vos chevilles étirées comme si, après avoir réussi à trouver la première, vous vous apprêtiez à desserrer le frein à main. Répéter la même opération pour le pied gauche.
Bien, laissez le temps aux deux pieds de trouver un équilibre et redressez-vous lentement en contractant les muscles des fesses, des cuisses et du ventre.
Euréka ! Vous êtes sur vos deux jambes... enfin normalement.
Maintenant, levez le pied droit, serrez les orteils, portez votre poids sur la pointe du pied, puis sur le talon. Poussez sur la pointe pour initier le pas suivant et éviter ainsi votre pire cauchemar : le claquement du talon. Attention : lorsque vous posez votre pied, projetez immédiatement le poids en avant. Ne levez pas l'autre pied avant d'avoir correctement réparti votre poids.
Maintenant que vous connaissez les bases, il y a un terrain d'entraînement idéal pour se perfectionner : les allées du supermarché. Parce que là il n'y a ni moquette, tapis, trottoirs, pavés, goudron qui fond, parquet, grilles de bouches de métro, sable, autant d'endroits cauchemardesques. Et puis, surtout, surtout, le caddy sert de stabilisateur.
Prenons un supermarché avec une moyenne de 24 allées :
Allées 1 à 5 : cultivez votre démarche et votre rythme jusqu'à ce que vous soyez en confiance.
Allées 6 à 10 : comme lors de vos cours de conduite, variez la vitesse : arrêtez-vous, redémarrez, négociez un virage (surtout ne jamais lâcher le caddy)
Allées 11 à 16 : travaillez votre déhanchement et faites des pas affirmés. Tournez sur vous-même, faites demi-tour, reposez-vous sur un talon
Dernières allées : soyez créatives, osez lâcher quelques instants le caddy. Pendant que vous faites la queue, reposez vous sur une hanche.
Le test pour savoir si vous avez enfin vraiment l'allure d'une star, c'est d'aller jusqu'à votre voiture sans le caddy, en utilisant vos sacs comme contrepoids.
Après cela, vous n'avez qu'une hâte : vos chaussures vous faisant l'effet d'un couteau à fromage, il est urgent de les retirer et d'enfiler votre bonne vieille paire de ballerines que vous regardez avec la plus profonde affection.
Parce que les seules filles capables de porter des talons hauts en continu, sont à ma connaissance, les mannequins en plastique avec les pieds qui se dévissent.
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