Revenir sur ses traces, encore une fois. Abandonné. Seul, toujours.
Il y a des choses qui recommencent éternellement, comme les saisons ou les marées. L'amour qui s'en va aussi. Revenir ici, c'est comme fouler de nouveau une terre brûlée maintes et maintes fois traversée. Encore... Mais c'est pas vrai !
Etre là, et ne pas en croire ses yeux, tellement saoulé de coups, la tête concassée, en vrac, le cur en miettes, abîmé, à genoux. De la merde au fond de soi. Se sentir laid, si laid d'être encore là, d'exister. Sauvageon en sursis, petite tumeur sans désir oubliée dans la boue des sentiments trahis. Alien des profondeurs, chair à canon, mal à être, à vivre, à faire avec. Revenir dans ce pays dévasté qu'on pensait avoir quitté à jamais, envolé qu'on se disait sur des cimes immenses, au grand pays des vallées fertiles, des rivières magnifiques, des arbres rois, des rires, des chants, des enfants. C'était si bon d'aimer quelqu'un. D'être aimer en retour.
Puis revenir ici, naufragé.
Des cendres, partout, en long en large en travers, des eaux noires, froides et le silence, obsédant, maître absolu. Alors à genoux, implorer les esprits, demander grâce, je vous en prie, je vous en supplie... Des larmes, les dernières, des larmes du sang, du sang de l'enfance, des secrets, de sa vie d'humain sur la terre. Arc bouté sur sa douleur, demander enfin la fin du monde, supplier que tout s'arrête, s'en aller, disparaître, s'enfuir et ne plus jamais revenir. Effacer les traces, toutes les traces. N'avoir pas été. Poussière.
Au soleil noir de la mélancolie, se perdre. Parce que cette voix n'en finit plus de résonner en soi, parce que ce visage incroyable ne viendra plus sourire. Il fait si beau quand quelqu'un vous aime.
Orphelin de ça, plus envie de rien. Même plus envie de respirer. Juste se tirer, pour de bon cette fois. Demi-tour.
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