La Parenthèse Enchantée
Jaimerai vous parler dAmma.
Amma est une Indienne qui passe son temps à embrasser les gens. Elle parcourt le monde entier, inlassablement, pour donner cet amour qui coule en elle. Des milliers dhommes et de femmes se déplacent rien que pour être serrés dans ses bras. Hier, elle était en France, demain ce sera lAllemagne et cest ainsi toute lannée depuis plus de vingt ans. Bien sûr, vu le nombre, il faut sarmer de patience et faire la queue des heures pour finir par lapprocher mais lexpérience intérieure est si forte que les gens reviennent dannée en année
Lan passé, une amie a fait le voyage. Son enthousiasme, la flamme dans ses yeux et tout ce quelle ne disait pas mais que je sentais mont vraiment donné envie daller y voir de plus près.
"Rester ici ou partir cela revenait au même". Combien de fois avais-je pensé de cette façon ? Combien de fois avais-je raté, par paresse, lassitude, découragement, loccasion dagrandir mon champ dexpérience en tant quhumaine ?
Toute petite, je me demandais ce quil y avait avant que je naisse, ce quil y aurait quand je serais morte
..
Ces questions métaphysiques/existentielles me sont plus que familières
Jaime faire toutes sortes dexpériences pour peut-être y répondre et savourer davantage ce que certains appellent la paix de lesprit.
Il était temps de me bouger.
Et me voilà dans un grand gymnase, face à un écran géant. Je reste en arrêt devant, complètement interdite, bouche bée, envahie par une grande émotion, les larmes aux yeux tellement lamour de cette femme est perceptible
Je la regarde : son sourire est accueillant, bienveillant. Ses mains se croisent derrière le cou dun homme, à genoux devant elle ; elle lui murmure quelque chose à loreille, son expression est dune grande tendresse. À peine son étreinte desserrée, une femme en blanc saisit lhomme, le relève pour léloigner, pendant que quelquun dautre prend sa place. Amma lui met une main sur la tête, lautre dans le dos, elle le serre contre elle, joue contre joue, avec tout lamour du monde
cest tellement spontané, naturel, elle le fait avec une telle joie, une telle bonté que je ne peux mempêcher dêtre submergée par lémotion.
Le tout dure entre cinq et dix secondes. Ce qui est incroyable cest que lexpression dAmma, chaque fois, est particulièrement joyeuse. Son embrassade est différente, jamais le moindre signe de lassitude, de fatigue, dautomatisme
Amma presse sa tête contre la tête de qui se présente : jeune, tête blanche, cheveux courts, cheveux longs, elle prend lautre contre elle, joue contre joue, bouche contre oreille, elle murmure, parfois, quelques secrets. Elle embrasse une maman et son bébé qui reste de longues secondes immobile, la tête dans le cou dAmma.
Je la verrai faire ça de vingt heures à huit heures du matin.
Pour ma part je passerai vers vingt trois heures et je vivrai un moment exceptionnel, dune intensité profondément bouleversante ; un moment au-delà du temps et de lespace où six secondes paraissent une éternité damour et de paix. Cest comme si cette femme venait combler cinq cent mille ans de désert affectif. Difficile sinon impossible dexprimer vraiment le ressenti
cest juste à vivre !
On ne peut pas parler avec les femmes ?
Alors laissons-nous embrasser par Amma
et le monde nen sera certainement que meilleur ..."
J'ai déjà utilisé ce texte pour participer à un jeu d'écriture (le n° 61) sur un site voisin.
http://mda.xooit.com/index.php
Il y avait 3 contraintes, un maximum de 3400 signes et deux phrases à placer
- "Rester ici ou partir cela revenait au même" Albert Camus dans L'étranger
- On ne peut pas parler avec les femmes François Mauriac dans Le sagouin
Pour ma première participation je suis arrivée avant-dernière ... ha ha ...
Qu'importe j'avais envie de partager cette expérience particulière ...
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