La piste aux étoiles est délavée
Le chapiteau tout déformé
Ca fait bien longtemps quon les a oubliés
Internet la télé les ont bien remplacés
Mais ils restent des gens dhonneur
Même si les autres sont moins donneurs
Ils nont pas la même idée du bonheur
Le spectacle doit commencer à lheure
Le vieux clown nest plus heureux
Peu à peu se sont vidés ses yeux
Les enfants du premier rang ont disparu
Sans leurs rires il nexiste plus
Tout là haut léquilibriste
Qui survole la piste
Dans un ciel électrique
Il se lâche en musique
---------------------------------------Voilà
---------------------------------------Léquilibriste
---------------------------------------Un coté heureux
---------------------------------------Un coté triste
---------------------------------------Ses pensées sont sur le fil
---------------------------------------Et le temps qui défile
---------------------------------------Perché
---------------------------------------Il vacille
---------------------------------------Etre de rêves fragiles
---------------------------------------Et de gestes graciles
---------------------------------------Dessous vos yeux qui brillent
---------------------------------------Son cur
---------------------------------------Qui na plus dailes
---------------------------------------Cest sur le fil
---------------------------------------Quil sélève
---------------------------------------Ses pas
---------------------------------------Sont quapparence
---------------------------------------Ils glissent sur la souffrance
---------------------------------------Butent sur lindifférence
---------------------------------------Lui
---------------------------------------Il ne fait plus la différence
---------------------------------------Entre le vrai et le faux
---------------------------------------Regardez le bien là haut
Le magicien aux cheveux blanc
Fais son tour en passant
Avec sa baguette à la main
Il y a une différence entre le magicien et lillusionniste. Lun samuse des petits esprits en leur faisant des tours. Lautre caresse les âmes de ses charmes.
Nuances.
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Les éclairages déclinent lentement sur la scène. Le rideau se lève. La luminosité diminue. Au centre se dessine un rond blanc de lumière dans un faisceau lumineux ce qui accentue le vide du décor.
Cest au même moment que le public déserte les strapontins et les gradins pour disparaître dans le soir. Face à lui-même le magicien entame sa énième et peut être dernière représentation. Cela fait belles lurettes que le numéro dillusionniste ne fait plus recette. Quimporte ! Au jeu du passe-passe lartiste nattend plus rien du résultat. Il enchaîne ses tours de prestidigitation comme on tourne les pages dun roman ennuyeux .Sur un fond de musique qui se voudrait entraînante et de rideaux délavés la silhouette de lartiste apparaît encore plus frêle quautrefois. Ses gestes semblent moins assurés. Son fameux regard hypnotique jadis si efficace semble lanesthésier. Son doigté a perdu de la vigueur, de la précision de la souplesse. Malgré ce il continue son numéro avec dignité devant la salle qui se vide. Et même son prestigieux tour du lapin magique tourne pratiquement au comique devant ce public irrévérencieux. Mais quimporte son esprit reste vif malgré le clair obscur de son smoking qu il traîne inlassablement depuis les grands soirs.
Lhomme exprime un curieux sentiment de lassitude et de jubilation. Lassé des plaisanteries dépassées, compassées. Lassé des critiques non fondées plus promptes à juger quà apprécier. Joyeux de ce quil peut encore garder en secret et de ce quil peut révéler.
A ce moment précis il est heureux.
Assis aux premiers rangs, poliment le public attend. Lartiste savoure ce bref silence, laccalmie, les rires sestompent les moqueries cessent. Sa respiration, régulière, lente, paisible, sereine est le gage de la maîtrise de son art.
Sa main saisit le gobelet dargent, le présente à la foule sans précipitation. Il mime den vider son contenu comme par devoir, qui disparaît un court instant sous le tissus blanc de son écharpe. Malin, il secoue la soie, passe une main dessus une main dessous, la dernière touche est pour le gobelet. Tout cela est fait avec grande application. Des gestes milles fois répétés, devant des yeux embrumés. Il prépare sans doute encore un coup déclat, une sortie vers le haut.
Et tout à coup cest le sursaut, brusque, inattendu, brutal. Il retrouve la faconde de sa jeunesse, mieux il illumine le soir par du jamais vu, de limpensable, de lincroyable, de la magie pure : une apparition. Il renoue avec le succès, sadonne au plaisir de l éphémère triomphe. Comme au bon vieux temps, mais il sait à présent que lillusion cest fini. Il est magique.
Le noyau de ses fidèles exulte, la salle est sans dessus dessous. La nouvelle de lévènement se répand comme une traînée de poudre. Mais ce nest pas là de la poudre aux yeux. Tous reviennent, dautres se pressent sous le chapiteau, ils affluent, ils veulent être présents et voir, savoir. Les gradins se remplissent, les rues de la ville se vident on ne peut y croire.
Désormais il est devenu un mage qui joue avec ces dons. Ses doigts dange défient le sens commun, ils narguent la raison : ils enchantent !
Lui sincline respectueusement, aucune expression de tristesse sur son visage pour sa dernière représentation.
Il gratifie son public dun large sourire. Sa mine est joviale. La foule le lui rend.
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La vielle spectatrice na dyeux
Que pour le dompteur de fauves
Les bêtes quil dirige comme il peut
Il les voudrait libre dés quil peut
Les barreaux de la caravane
Ne sont pas les herbes de la savane
Artistes, tziganes
Comme le monde est triste
Refaites nos murs de ciel bleu
En souvenir des gens heureux
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