Cest bien elle
Je la reconnais
Cétait hier chez mon libraire.
Un souvenir tenace.
Sa chevelure plus noire que laile du corbeau jurait au milieu de linsipide troupeau damateurs de romance. Derrière lhorizon de papier, le nez plongé dans un bouquin elle sétait envolée.
Dans cette rue qui grouille de monde, je dois presser lallure.
Surtout ne pas la perdre.
Membarquer dans son histoire, me soumettre à ses caprices. Je serais son vice.
Un sortilège quelle ignore me piège dans sa ville.
Cest le diable qui menvoie me frotter à son âme.
Lébène de ses boucles rebelles danse le sabbat sur sa nuque. La pâleur de sa peau invite à la morsure.
Je me consume déjà dans son sillage.
Un parfum plus grisant que celui de lopium saccroche à ses pas . Derrière cette sulfureuse créature je souffre le martyr . Son charme me désarme. Elle déferle dans mes veines plus vite que le venin.
Si josais je fermerais les yeux et menchainerais à ce diabolique fil dAriane qui serpente dans les airs.
Mais la foule docile qui souvre sur son passage mest beaucoup trop hostile. On aime pas les étrangers ici. Surtout pas ceux dont lombre se fane sous le soleil.
Alors je joue des coudes les yeux rivés à sa trace. Ma cigarette étincelle sur le dos des badauds qui lambinent devant moi.
Si je mécoutais je les enverrais tous en enfer, rôtir à petit feu.
Le temps sen mêle en fleurissant la rue de parapluies. De grosses gouttes claquent sur le pavé et roulent dans la poussière.
Les Dieux sont avec elle, mais il men faudrait bien plus pour me décourager. Sur mes épaules la pluie ruisselle, me donne des ailes, je vole
Je suis déjà sur ses talons. La fièvre me gagne. La chaussée fume autour de moi.
Elle ne voit rien, ne devine rien. Trop absorbée par ce reflet qui lui sourit dans les vitrines. Une jolie rose sans épines.
Sans se méfier, elle va tomber dans mes filets. Probablement là-bas, au pied de cette terrasse qui fête le retour du soleil.
Un peu de malice, quelques bons mots et un sourire, je me vois déjà assis au bord de lembellie. Elle rougira derrière son thé, son lit nest quà deux pas de là
Je suis si proche. Les plis de son imper me lèchent le bout des doigts. Les battements de son cur sont là, tout contre moi
Un instant dinattention, elle méchappe. La voilà hors de portée
Sur le seuil dun porche immense elle savance. Une porte à deux battants lengloutit.
Une église
Damnation!
Le sol souvre devant moi. Les gargouilles ricanent sur ma tête. Je suffoque dans des vapeurs de souffre
Lucifer me rappelle.
Je viens encore de me prendre une gamelle.
Ce soir un fois de plus je dormirais en enfer.
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