A peine se tient-on debout et sait on sexprimer par quelques babillages, dont lentourage sextasie la bouche grande ouverte, que les parents dans un élan de bienveillance teinté dune envie folle de saérer lemploi du temps et lesprit sinterrogent pour trouver quelle activité choisir pour occuper le petit dernier de la fratrie.
Pour ma part, les recherches ne furent pas ardues à entreprendre, ce fût le sport. Pas en tant que pratiquant, jétais trop chétif pour cela, mais, en tant que supporter.
Dès lâge de huit ans, je me rendais au stade, vibrant pour mon équipe de 1ère division, le FC Metz.
Jarborais fièrement la tenue officielle, un maillot impeccablement repassé, la croix de Lorraine dun blanc immaculé brillant sur le devant, un short aux couleurs grenat et blanc et des chaussettes en coton, qui les jours de matchs estivaux me grattaient furieusement les mollets.
Jétais fier - Seul, mais fier. Jaurais bien aimé y aller avec mon beau-père, sa main dans la mienne, pour me rassurer dans la bousculade de la foule : «tinquiètes pas bonhomme !»
Oh, il naurait pas eu besoin de me le dire, un regard aurait suffit, un sourire.
Il nétait pas là - Mon beau-père naimait pas le sport et la foule encore moins. Je nai jamais pu malgré mes qualités innées de négociateur lentraîner dans un stade.
Ce nest pas faute davoir essayé : «si je rapporte un A dici à la fin de la semaine, tu viens ?» - Pas de réponse. Je crois navoir jamais ramené de A.
La passion étant trop forte, je my rendais tout de même, avec des camarades de classe et leurs pères ou leurs grands frères.
Tous les quinze jours, lorsque léquipe jouait à domicile, jattendais fébrile et impatient que lun deux me donne confirmation du rendez-vous.
Avec les quelques pièces de maman, qui tintaient dans ma poche, jachetais à la baraque à frites un sandwich dont la saucisse baignant dans la moutarde manquait de tomber à tout moment.
Les regards complices durant le match, je les ai connus, mais, pas ceux qui mauraient fait le plus plaisir.
La main à la fois ferme et tendre sur lépaule, après un but adverse, sensée vous consoler et vous soutenir que tout allait sarranger, non plus.
Mes petits copains formaient avec leur père, leur frère, des îlots de tendresse, de complicité. Détranges et lumineux pays que jobservais sans pouvoir en franchir la frontière invisible.
Je canotais parfois de lun à lautre. Dans ces moments, sans les toucher, je mapprochais, pour prendre un peu de leur chaleur, surtout les soirs de défaite. Il pleuvait un peu dans mes yeux.
Au coup de sifflet final, si le match avait été beau, même si la victoire nétait pas au bout, un moment de grâce collectif nous était donné qui tranchait tant avec le brouhaha, les chants guerriers et les hurlements primitifs.
Un silence enchanté où tous ceux qui sortaient du stade en se bousculant quelque peu, foulant lherbe à billets, shootaient dans des canettes de bière en sobservant du coin de lil et du cur, heureux davoir participé à un moment de fête, tous ensemble.
↧